APPARENCE D’UNE INJONCTION INTERLOCUTOIRE DU PRÉSIDENT EMMANUEL MACRON : « Les autorités de transition du Mali, dans la rupture de partenariat (militaire) avec la France, ont fait bon usage de la sagesse inscrite dans notre culture et tradition maliennes »

Rappelons que le président français Emmanuel Macron, lors d’une rencontre avec les ambassadrices et ambassadeurs français le 6 janvier 2025, a reproché à l’élite africaine de ne pas lui avoir dit « merci » pour l’action de la France contre les groupes terroristes en sol africain : « Si ce n’était pas la France, vous seriez 10.000 fois plus dans la merde. Les dirigeants africains sont ingrats et remercieront la France un jour ». Cette revendication est une forme d’exigence à faire reconnaître une appréciation dans l’échelle d’un désir d’ascendance que nous qualifions de dogme ayant conduit à l’injonction interlocutoire adressée à nos dirigeants. Nous tentons d’interpréter la signification de sa rhétorique.
Nous sommes curieux de savoir si Macron a pris soin de faire une évaluation de la performance de son gouvernement en matière de politique étrangère dans le cadre de la FrançAfrique ou d’avoir établi un bilan positif que son gouvernement a enregistré en matière de lutte contre le terrorisme en Afrique, particulièrement au Sahel, pour ne citer que l’expérience de l’intervention militaire française au Sahel où sont regroupés les pays de l’Alliance des États de l’Afrique (A.E.S.). Toutes les évaluations et les rapports des observateurs indépendants depuis 2012, y compris les populations des pays concernés, sont arrivés à dégager un consensus, de façon unanime par un constat d’échec, les différentes opérations des forces engagées, notamment SERVAL, BARKHANE, et TAKUBA. Après plus de dix (10) ans d’opérations militaires françaises au Mali, « les coûts estimés s’élèvent, entre 2019 et 2022, passant de 299,080 milliards de FCFA en 2019 à 476,378 milliards de FCFA en 2023. Par contre, les chiffres indiquent qu’en 2014, il y aurait eu environ 653 millions de dollars dans la sécurisation du Sahel contre 241 millions en aide au développement bilatérale de la zone ». C’est pourquoi les populations sahéliennes sont moins enthousiastes à reconnaître leurs efforts et à exprimer une quelconque gratitude, car la moisson a été maigre et mitigée dans la neutralisation des terroristes au Sahel. La raison invoquée par certains observateurs ainsi que les États concernés est « la complicité avec les terroristes qui sont instrumentalisés pour commettre des actes de sabotage et de déstabilisation ». L’ex-ambassadeur français au Mali, Nicolas Normand, a relevé cette collision entre les forces françaises et les rebelles-terroristes. Cette situation a été dénoncée par les autorités maliennes devant les instances de l’ONU. C’est aussi pourquoi les pays de l’AES ont décidé de ne pas sous-traiter ou déléguer la sécurité et la protection de leurs citoyens à une force étrangère. Pour paraphraser Abdoulaye Diop, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale du Mali lors d’un briefing le 24-01-2025, il a fait remarquer par une mise en cause que « pour l’Union Européenne dont la France est membre, la vie humaine en Afrique ne vaut pas la vie humaine en Ukraine (c’est-à-dire qu’elle n’est pas la même). Le ministre explique son raisonnement par la rhétorique de ‘’deux poids/deux mesures’’ dans le cadre de la mission européenne de formation au Sahel, EUCAP. Il donne comme exemple les militaires maliens engagés dans cette formation qui devaient apporter leurs propres munitions, sous prétexte que l’UE ne donne pas des armes létales aux militaires sahéliens alors que, subitement avec le déclenchement de la guerre en Ukraine, l’UE autorise la délivrance des armes létales à l’Ukraine ». Voilà une autre raison pour ne pas exprimer sa gratitude face une telle discrimination dans la coopération. Très récemment, après l’attaque meurtrière des terroristes survenue le 8 janvier 2025 au Bénin et qui a coûté la vie à une trentaine de soldats, le secrétaire général de la confédération syndicale des travailleurs (CSTB), Naimi Kassa Mampo, a « dénoncé une coopération inefficace et accuse la présence française d’aggraver le terrorisme en Afrique ». Dans ce contexte, une manifestation est prévue pour le 25 janvier 2025. Quel est le sens d’une justification de la gratitude après les événements suivants : la douloureuse expérience de plus de deux siècles d’esclavage, la souffrance et les abus de la colonisation imposés aux noirs africains et, finalement, la pratique funeste de la traite des noirs. Partout, l’expression de gratitude par les Africains a laissé place aux récriminations qui nécessitent un examen de conscience et de réarticulation des politiques de coopération.
Commençons par examiner les événements sanglants survenus durant la guerre du Cameroun. D’après les rapports d’archives, « un effroyable massacre aurait été perpétré par des Français au Cameroun, entre 1955 et 1971, lorsque les forces coloniales ont torturé, massacré, empoisonné près de 100 000 nationalistes camerounais dont certains auraient été portés disparus, pour sauvegarder les intérêts géostratégiques et économiques de la France dans cette partie de l’Afrique centrale. On signale que l’un des massacres les plus notables aurait été celui d’Ekité, perpétré le 31 décembre 1956 par les forces coloniales françaises ». « Un fait historique troublant concernerait les écueils survenus le 02 mars 1960, sous la direction de l’armée française, lorsque les troupes camerounaises rasent le bourg de Yogandima, massacrant près de 8.000 civils sans armes. L’ancien ministre français des Armées, Pierre Guillaumat, confirme : « Foccart a joué un rôle déterminant dans cette affaire. Il a maté la révolte des Bamilékés avec l’ancien président Ahmadou Ahidjo et les services spéciaux ». L’administration coloniale française faisait face à la résistance de l’Union des Populations du Cameroun (UPC) née dans les années 1940.
Des faits historiques, qui ont marqué la mémoire collective africaine
Examinons maintenant une autre guerre civile, celle de la sécession du Biafra (Nigéria) en Afrique où l’odeur de la France n’était pas loin. Il s’agit d’une autre guerre horrible qui retient notre attention, mais pas notre souffle; car nous devons démontrer si les conséquences des multiples drames survenus en Afrique et qui impliquent la France, justifient-ils une gratitude. « Le conflit du Biafra,qui s’est déroulé entre 1967 et 1970, n’échappe pas à notre observation critique envers la politique africaine de la France ». Le 30 mai 1967, Odumegwu Emeka Ojukwu, gouverneur militaire de la région orientale du Nigéria, proclame l’indépendance de la région, qui prend le nom de République du Biafra avec Enugu pour Capitale. Le général Yakubu Gowon, président du Nigéria, déclara la guerre au Biafra le 6 juillet 1967. Paris penche pour le Biafra car, selon son conseiller Afrique, Jacques Foccart, le général de Gaulle souhaite le « morcellement » du pays afin d’affaiblir la zone d’influence britannique. Ainsi, d’après les observations des rapports d’archives, « la France ravitaille clandestinement les sécessionnistes par avion depuis le Gabon. Dès le début des hostilités, de Gaulle aurait indiqué à son émissaire Jacques Foccart qu’il souhaite affaiblir le ‘’géant nigérian’’ ». Foccart écrit trente ans plus tard : « De mon point de vue, le Nigéria était un pays démesuré par rapport à ceux que nous connaissions bien et qui faisait planer sur ceux-ci une ombre inquiétante ». Le blocus terrestre et maritime de la poche biafraise où sont coincés des millions de personnes sur quelques milliers de kilomètres carrés entraîne alors une terrible famine où entre 600 000 et un million de personnes seraient mortes de faim, de soif et d’épidémie. Le consultant canadien pour le développement, Ian Smillie, soutient que « la prolongation de la guerre due au soutien français aux insurgés du Biafra aurait contribué à la mort de près de 180 000 civils ». D’autres faits historiques, qui ont marqué la mémoire collective africaine, contribuent à assombrir une quelconque marque de reconnaissance et de gratitude dans les actions de déstabilisation menées par la France en Afrique, notamment au Sahel. Il faut se rappeler de la guerre d’indépendance de l’Algérie. « La guerre d’Algérie prend place dans le mouvement de décolonisation qui affecta les empires coloniaux occidentaux après la Seconde Guerre mondiale. Elle s’inscrit dans le cadre du combat anti-impérialiste ». Examinons les faits saillants historiques durant cette période : « L’impôt colonial prévu par le Code de l’Indigénat que subissaient les indigènes pour des raisons raciales et religieuses impliquait un paiement d’un impôt « sur la race » par les indigènes des différentes colonies. Dès lors, est apparu comme un système d’impôts « ethniques » faisant obstacle à l’adoption de toute culture « civile » en Algérie.
D’après les statistiques tirées des archives, « Il faut rappeler que des dizaines de milliers d’habitants de l’Algérie française, estimés à 68 000 combattants, ont participé à la libération de la France. Le 08 mai 1945 ont lieu des manifestations d’Algériens dans plusieurs villes de l’Est du pays (Sétif et le Constantinois), qui devaient permettre de rappeler leurs revendications nationalistes, de manière concomitante, avec la liesse de la victoire. Officiellement, elle aurait fait 1 500 morts parmi les indépendantistes, chiffre plus proche des 5 000 à 6 000, selon Charles-Robert Ageron, ou des 6 000 à 6 500 calculés par le Service Historique de la Défense et Roger Vétillard, tout en précisant qu’il s’agit d’une surestimation. Selon l’historien Benjamin Stora, il s’élève entre 20 000 et 30 000. Le Parti du Peuple Algérien (PPA) estime qu’il y a eu 45 000 morts ». D’après une évaluation controversée du bilan statistique, « Nombre d’exactions, de crimes, de violences sexuelles et d’exactions commises par l’armée coloniale française durant la guerre d’Indépendance algérienne tombent selon la convention de Genève, sous la qualification juridique de crimes de guerre. Le recours à une large échelle entre 1956 et 1961 à un gaz toxique, le CN2D, contenant de la diphénylaminechlorarsine (DM), est révélé en avril 2022 grâce à une enquête de la journaliste Claire Billet parue dans la revue XXI, fondée sur des témoignages d’anciens militaires français. À cette date, l’accès aux archives de l’armée française n’est toujours pas autorisé. L’utilisation de ce gaz est interdite par le protocole de Genève signé par la France en 1925. Le texte proscrit « l’emploi à la guerre de gaz asphyxiants, toxiques ou similaires et de moyens bactériologiques ». D’après notre recherche dans les archives, « La France se serait dispensée de suivre le protocole, considérant que la Guerre d’Algérie n’était pas une guerre, mais une opération de maintien de l’ordre. L’utilisation de ce gaz toxique peut être qualifié de crime de guerre selon le protocole de Genève, mais également la convention de Genève relative aux droits humains ». Selon les rapports d’archives, « Les exécutions sommaires étaient fréquentes, notamment lors des ‘’corvées de bois’’ » où on laissait le prisonnier filer avant de l’abattre pour « évasion ». Les mêmes rapports reprochent « à l’armée d’avoir procédé à l’arrestation de milliers d’Algériens dont certains auraient disparu; mais quasiment pas d’Européens comme Maurice Audin, ‘’un cas rarissime’’ », note Sylvie Thénault. Saura-t-on un jour quel sort aura été réservé à ces combattants, sympathisants ou simples civils arrachés à leur village ? Peut-on espérer, au nom de la conscience humaine et la recherche de la vérité universelle, une forme de reconnaissance mémorielle qui vaut le pendant de la gratitude officielle ? Autrement dit, « l’évocation d’une émotion puissante et transformatrice dans nos vies par laquelle découle la révélation que ces valeurs de repentance et de reconnaissance nourrissent notre bien-être spirituel et émotionnel ». Pendant cette période noire, combien d’Algériens ont été torturés avant d’être mis à mort ? Le président s’était exprimé sur le sujet, parlant d’un « système institué légalement », faisant écho aux aveux du général Massu au « Monde » en 2000 : « La torture, assurément répréhensible, était couverte, voire ordonnée, par les autorités civiles » Pendant cette guerre, tel que rapporté dans les archives, la France aurait utilisé du napalm, miné massivement le territoire, dressé des barrages à 20 000 volts aux frontières et parqué des populations entières dans des camps de regroupements. « Un quart des huit millions d’Algériens ont dû partir de chez eux, c’est colossal », explique Sylvie Thénault. Jusqu’au bout, la logique de cette guerre aura été celle de la terreur. « Entre 1960 et 1966, l’armée française a en effet procédé à 17 essais nucléaires dans le Sahara algérien. En Algérie, la France est accusée de ne pas agir suffisamment pour identifier et décontaminer les lieux d’enfouissement des déchets nucléaires ». Toutes ces horreurs doivent-elles se justifier moralement ou doivent-elles exiger la repentance avec réparation ? Ici, il s’agit de crimes graves et il n’est nullement question de gratitude. La France de Macron doit avoir la volonté d’assumer les conséquences de ces actes moralement condamnables commis par le passé et de s’engager à les réparer. Ces événements douloureux, qui ne doivent plus se répéter, contrastent avec la lutte contre le terrorisme en Afrique.
De multiples tragédies et drames injustifiés et non soldés
Nous terminons notre réquisitoire avec le massacre de Thiaroye. « Ce triste événement est qualifié, selon le droit humanitaire international, de crime imprescriptible, commis par les troupes et des gendarmes français à l’encontre de braves combattants africains péjorativement appelés ‘’tirailleurs africains’’ » ou « chair à canon », le 1er décembre 1944, au camp militaire de Thiaroye, près de Dakar, dans la colonie du Sénégal. Cet écueil survient à la suite d’une manifestation des tirailleurs, anciens prisonniers de la Seconde Guerre mondiale récemment rapatriés, réclamant le paiement de leurs indemnités et le versement du pécule qui leur était promis depuis des mois. Leur cas est tellement pathétique qu’ils sont tout simplement victimes d’une ingratitude inqualifiable sur le plan du Droit ou de la morale. Sans leur reconnaître une appréciation de leur mérite d’avoir défendu l’honneur de la France, ils ont froidement été abattus dans l’impunité totale. Deux documents militaires français font état du bilan : l’un de 35, l’autre de 70 tirailleurs tués. L’historien sénégalais M’Baye Guèye dénombre 191 tués ; plusieurs historiens français, dont Armelle Mabon et Martin Mourre, évoquent l’hypothèse de plusieurs centaines de victimes sans pour autant que ni l’une, ni l’autre de ces hypothèses puissent être étayées de manière décisive à ce jour. Les multiples tragédies et drames injustifiés et non soldés, qui sont survenus en dehors de toute règle et norme juridique, suite aux actions de la France contre les innocents citoyens d’Afrique, ont frappé la conscience de l’humanité à cause de leur gravité qui s’est poursuivie dans le temps et la durée. L’impact de leur conséquence dépasse la portée significative des actions des terroristes du Sahel, considérant que de simples excuses ne sont pas suffisantes sans une volonté réelle de réparation. Si nous devons comptabiliser les événements mémoriels qui méritent une gratitude ou des excuses, la dette contractée par la France envers l’Afrique est plus élevée et justifie une large compensation. En ce XXIè siècle, la France est restée la seule puissance coloniale nostalgique qui n’a pas renoncé aux conquêtes expéditionnaires militaires et la réaffirmation de son influence par l’installation de bases militaires en sol africain pour son propre intérêt et non pas celui des Africains. Malheureusement, la rhétorique de stigmatisation des Africains par quelques dirigeants français nostalgiques d’un temps révolu est constante et caractérisée par du mépris et l’arrogance. Les valeurs portées par les nouveaux dirigeants africains contrastent avec la conception de vassalisation, de soumission et de domination des anciens dirigeants africains complexés qui sont idéologiquement rompus au slogan « merci maître ou merci patron ». C’est le cas d’un président africain nouvellement désigné à qui Emmanuel Macron lui a reconnu la qualité de celui qui a réalisé en trois mois ce que feu Ibrahim Boubacar Keïta n’a pas pu réaliser en deux mandats. La contrepartie, c’est sans doute une expression de congratulation « yes man ». Cette situation est souvent illustrée à travers les relations internationales dans un rapport de domination émaillé d’injonctions, de menaces de sanction, de chantages, de mépris, d’arrogance, d’atteinte à l’intégrité et à la sécurité et, finalement, la stratégie d’utiliser la peur afin d’accomplir la prédation sur des ressources naturelles. Rappelez-vous de la controverse sur les bienfaits ou inconvénients de la colonisation : « La colonisation est un sujet très controversé et sensible. D’un côté, elle a permis le développement de certaines régions et l’introduction de nouvelles technologies. D’autre part, elle a souvent été accompagnée de violences et d’exploitation des populations locales. Il est important de présenter les deux côtés de la médaille dans une position d’objectivité. Il est également crucial de rappeler que l’impact de la colonisation sur les pays colonisés est encore visible aujourd’hui, notamment dans les relations économiques et politiques avec les anciennes puissances coloniales; mais également l’endoctrinement culturel et idéologique sur une catégorie de citoyens incapables de se définir une identité propre et se détacher du regard du colon par la déconstruction de ce que celui-ci considère comme une réalité universelle. Enfin, il convient de donner une voix aux descendants des populations colonisées pour qu’ils puissent partager leur histoire et leurs perspectives ». La colonisation a eu de nombreux désavantages pour les peuples autochtones qui ont été soumis au pouvoir colonial. Les violences, les expropriations, l’exploitation, les taxes de capitation et la domination ont été monnaie courante pendant des siècles. Les colons ont imposé leur culture, leur religion et leurs valeurs aux populations locales, souvent par la force. Ils ont également introduit des traitements inhumains pour les travailleurs locaux, tels que le travail forcé et la traite des esclaves. Tout cela a contribué à la destruction culturelle, sociale et économique des peuples autochtones. De plus, les puissances coloniales ont exploité les ressources naturelles des territoires colonisés, souvent sans tenir compte des conséquences à long terme. Cela a entraîné la destruction de l’environnement et l’appauvrissement des populations locales. Enfin, la colonisation a créé des inégalités économiques et sociales profondes qui ont persisté longtemps après la fin de la période coloniale. Les peuples autochtones ont été laissés de côté dans les processus de développement, souvent relégués à des postes subalternes dans l’économie et la politique. En somme, la colonisation a été une expérience traumatisante pour les peuples autochtones, qui ont subi de nombreuses injustices tout au long de cette période. Les conséquences de la colonisation sont encore visibles aujourd’hui dans les discriminations, les violences et les inégalités qui affectent encore ces populations. Il n’y a pas d’avantages à la colonisation. La colonisation est une pratique qui a causé des dommages incommensurables à l’humanité, notamment en ce qui concerne les anciennes colonies françaises. Les sociétés africaines ont subi une exploitation économique brutale, la perte de leur identité culturelle et même des génocides. La colonisation a déshumanisé les Africains et les a considérés comme des êtres inférieurs. Les conséquences de la colonisation se font encore sentir aujourd’hui dans les anciennes colonies, qui sont confrontées à des défis socio-économiques graves. Il est important de reconnaître que la colonisation n’a apporté aucun bénéfice aux peuples colonisés, mais a plutôt entraîné leur oppression et leur souffrance. Le phénomène a laissé un lourd héritage dont l’idéologie est à déconstruire. L’homme politique français Georges Clémenceau s’est exprimé sur le sujet le 31 juillet 1885 à la chambre des députés. Il critique la politique d’expansion coloniale de la France en réponse au discours colonialiste de Jules Ferry du 28 juillet 1885.
Gratitude ou ingratitude, éclairage…
Rappelez-vous d’avoir souvent entendu que la France a apporté aux Africains la civilisation, le progrès et la démocratie. Rappelez-vous d’avoir entendu par Nicolas Sarkozy que l’Afrique n’est pas rentrée dans l’histoire. Aujourd’hui, il existe une génération d’Africains qui a pris conscience de cette forme de relation d’asservissement et de paternalisme et qui refuse l’idéologie de catégorisation et d’infériorisation. Nous poursuivons notre réflexion sur la nature et la portée du concept « GRATITUDE » ou « D’INGRATITUDE ». Pour ceux qui prétendent connaître l’Afrique, nous tenons à leur rappeler que la gratitude, comme valeur, se présente sous trois formes dans la tradition africaine. Avant d’élaborer sur cet aspect, nous précisons d’abord que dans la société africaine, on ne demande pas à être remercié pour un service rendu si on a le sens élevé de l’humilité, sinon on tombe dans des considérations subjectives de suffisance.
Première forme fondée sur l’échec dans l’atteinte de résultats
Eu égard à toutes les opérations tumultueuses ayant impliqué la France, surtout dans les pays de l’A.E.S., il y a eu une perte de confiance dans les relations. Cette insatisfaction se manifeste par un code culturel qui consiste à se retirer d’une relation pour signifier implicitement « Merci en se libérant d’une relation encombrante ». Dans le cas du Mali, les autorités de transition, en mettant fin à l’accord de coopération militaire, voulaient exprimer leur volonté de retrouver la liberté pour le pays, afin de réarticuler souverainement sa stratégie de lutte contre le terrorisme, tout en remerciant la France pour ses efforts au Mali et déclarer solennellement la fin d’une expérience de partenariat sans issue. Notre tradition diplomatique, puisée dans nos savoirs ancestraux, ne semble pas avoir été comprise, d’autant plus que le fameux « merci réclamé » avait été adressé aux officiels militaires représentant la France lors des cérémonies de « remise-reprise » des emprises au Mali.
Deuxième forme
C’est de manifester volontaire et spontanément sa satisfaction et sa reconnaissance pour un service bien accompli en disant « merci ». Cette gratitude repose sur un sentiment de sincérité qui n’aura aucun impact négatif sur la continuité des relations qui se renforceront dans la durée par cette expérience de confiance.
Troisième forme
Elle se manifeste par un comportement mitigé empreint d’hypocrisie pour exprimer une simulation de gratitude dont l’objectif vise uniquement à faire plaisir à son maître ou à son supérieur. C’est d’agir avec ruse, flatterie et tromperie pour dire « merci » accompagné de « compliments ». Ce phénomène est une pratique courante au sein des administrations africaines où beaucoup de conseillers ou ministres évitent la contradiction avec un chef omnipotent à qui ils doivent leur poste ou promotion.
MERCI ! UNE EXPRESSION DE GRATITUDE, UNE VALEUR
Ce simple petit mot qui renferme une valeur indéterminée, un consensus social, est devenu une rhétorique politique qui a dominé l’actualité à la suite de son usage par le président Macron. Que signifie cette expression qui suscite tant d’émotions et de passions ? Ralph Waldo Emerson* offre une introduction utile sur ce à quoi peut ressembler la pratique de la gratitude et cet article commencera par là et explorera la recherche psychologique actuelle derrière cette valeur. D’après lui, « La gratitude est une émotion similaire à l’appréciation et la recherche en psychologie positive, a trouvé des raisons neurologiques pour lesquelles tant de personnes peuvent bénéficier de cette pratique générale consistant à exprimer leurs remerciements pour nos vies en période de défis et de changement »
QUEL EST LE BUT DE CETTE ÉMOTION ?
Selon l’auteur, « La gratitude est un acte désintéressé qui est accompli sans condition, pour montrer aux gens qu’ils sont appréciés ‘’un geste de générosité, un cadeau offert gratuitement, sans contrainte’’; elle est une façon de comprendre à quoi ressemble cet acte ». C’est cette situation qui décrit la gratitude exprimée par les autorités de transition au Mali lorsqu’elles ont choisi de s’excuser auprès des officiels militaires français lors des cérémonies de rétrocession des emprises et du retrait des forces françaises (non pas que le Mali a commis une faute en s’assumant, mais pour honorer une rupture de partenariat inscrit dans la compréhension de notre culture et tradition maliennes). Si nous interprétons le sens de cette définition, toute forme d’exigence, non justifiée, pour réclamer cette reconnaissance nous conduit vers une pathologie de narcissisme ou de mégalomanie. Autrement dit, une forme de surestimation de ses capacités et la prévalence d’une sévère illusion de grandeur qui découle d’une haute estime de soi. Pour l’auteur, les gens peuvent utiliser la gratitude pour former de nouvelles relations sociales ou pour renforcer les relations actuelles. Il précise que les actes de gratitude peuvent être utilisés pour s’excuser, faire amende honorable et aider à résoudre d’autres problèmes.
- Préparé par Boubacar Touré
- Juriste Montréal (Canada)
Source :
https://www.bing.com/search?FORM=SLBRDF&PC=SL10&q=le+massacre+des+fran%C3%A7ais+au+camerou
https://rebellyon.info/2-mars-1960-massacres-au-Cameroun
https://www.bing.com/search?FORM=SLBRDF&PC=SL10&q=la+guerre+du+biafra+au+nigeria
https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_d%27Alg%C3%A9rie#Contexte
https://fr.wikipedia.org/wiki/Massacre_de_Thiaroye
https://acapros.fr/avantages-et-inconvenients/les-avantages-et-les-inconvenients-de-la-colonisation/
*Ralph Waldo Emerson, né le 25 mai 1803 à Boston et mort le 27 avril 1882 à Concord, est un essayiste, philosophe et poète américain, chef de file du mouvement transcendantaliste américain du début du XIXᵉ siècle.
https://www.savoiretculture.com/discours-georges-clemenceau-politique-coloniale/